30/01/2025

Pourquoi les médias sont incompétents sur les crimes au couteau ?

Pourquoi les médias sont incompétents sur les crimes au couteau ?

La mort n'a pas de traitement équitable dans les médias français.

 

Pourquoi des crimes reviennent en boucle sur des chaînes d'informations de grande audience, tandis que d’autres n'ont droit qu'à une brève insignifiante ?

De nombreuses pistes se dessinent, qui dépassent grandement l’horreur des faits, selon que l'on suit la ligne éditoriale aveuglément ou un enjeu autre.

 

Aucune n'ont quoi qu’il arrive une réelle cohérence statistique, sociologique ou d’honnêteté à l'horizon.

Pourquoi y a-t-il eu trois semaines de déferlante informationnelle sur un meurtre commis avec un couteau lors d'une soirée dansante dans un village, et pas sur un père qui tue sa femme et ses quatre enfants (1) ?

Le Figaro, dans cette période, bat tous les records avec 187 sujets disponibles en ligne sur Thomas Perotto à Crépol (2), depuis sa mort le 19 novembre 2023.

Mais il n'en consacre, à l’époque, que 11 au quintuple homicide commis à Meaux le 25 décembre 2023.

Comment ce fait il que certains faits divers défraient la chronique, jusqu'à envahir tous les plateaux de télévision et jusqu'aux quotidiens les plus sérieux qui traitent peu le fait divers ?

Parce qu’un journaliste n’a pas le temps, pas les moyens, les compétences, ni la formation nécessaire pour relater des faits sociétaux d’une telle gravité.  

De ce fait, quels sont les ingrédients nauséabonds de ces choix éditoriaux ?

L’horreur du traitement médiatique

Aussi effroyable sois la mort de l’un ou de l’autre, est-ce l'âge des victimes qui influence un choix éditorial ? Thomas, tué à Crépol dans la nuit du 18 au 19 novembre 2023, avait 16 ans.

Et pourtant, l’horreur du traitement médiatique est présente… Loane, jeune fille tuée par son beau-père à Toulouse le 5 janvier (3) de la même année avait 16 ans également.

Le recensement de ces deux drames sur dix des principaux sites d'information (Europe 1, le Parisien, Ouest-France, Le Figaro, Le Monde, Libération, TF1, BFMTV, France Info et CNews) montre un chiffre terrifiant dans le traitement de ces morts violentes de deux adolescents :

  • 626 articles pour le crime au couteau de Thomas.
  • 5 pour le meurtre de Loane.

La matière inflammable des faits divers

Comme pour le meurtre de Lola, ou l'attentat d'Annecy (5), les circonstances du fait divers en font un objet inflammable et indiscutablement rentable. Voilà l'une des clés efficaces d’un emballement « utile ».

La piste de la couleur éditoriale de chaque média semble relativement évidente : les 4 médias mainstream principaux ont consacré, à eux seuls, plus de 400 sujets sur le drame de Crépol.

Des crimes sociétaux un peu moins grave ?

Il est certain maintenant qu’il existe une dissymétrie totale dans le traitement des homicides en France.

Au vu du peu d’intérêt porté à des homicides d’une extrême violence au profit d’autres équivalent, cela appuie qu’en général les médias considèrent les crimes perpétrés dans un cadre familial un peu moins sociétal et digne d'intérêt.

Parmi les 118 meurtres de femmes recensés en 2023 par les associations de défense, une femme de 29 ans y est poignardée le 17 juin 2023 devant son bébé de quatre mois (6).

Le fait est ignoble, mais rien sur Europe 1, CNews. Et seulement deux sujets dans le Parisien, un dans le Midi Libre et trois sur BFMTV.  

Pourquoi cette ignorance de traitement ? Peut-être parce qu'il s'agit de citoyens lambdas, dont le logement est « propre et bien tenu, sans signe de difficultés quotidiennes apparentes » et que ni l'homme, ni la femme n'étaient connus des services de police ?

Ou parce que, peut-être, les meurtres de femmes ne soulèvent pas suffisamment d'indignations dans l'opinion et font donc peu d'audience en France ?

Des crimes de femmes et presque aucun sujet dans les médias

Au 15 janvier 2024 sept femmes avaient perdu la vie tuées par leur conjoint ou leur ex-conjoint, en plus de Loane.

Indifférence générale concernant ces six femmes : aucun sujet sur Europe 1, deux sujets en tout sur Cnews et cinq sur BFMTV. Seuls les journaux Ouest-France et RMC consentent une place à une femme d'une vingtaine d'années, étranglée à Mayotte le 9 janvier (*).

Aussi brutal soit ce constat, il est nécessaire de noter que le crime commis à Crépol fait partie des homicides les plus courants de notre société.

Deux tiers des homicides ne sont ni crapuleux, ni commis dans un cadre familial (4). Soit, pour 2022, 605 homicides de ce type contre 112 crapuleux et 242 intrafamiliaux.

Conclusion

À part la difficulté, réelle, pour un journaliste, de mener une enquête sur un événement extrêmement douloureux pour les éventuels témoins, généralement les proches, à commencer par les enfants, il n’y pas d’autres d'explications que l’incompétence.

Sinon la confirmation que les médias sont le reflet, voire la caisse de résonance, de la société, autant qu'ils en sont les observateurs.

Or, notre société ne sait pas encore juger les crimes aux couteaux comme tels, puisque la terminologie ne figure même pas encore dans le Code pénal.


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