Pourquoi des machettes ont-elles été utilisées au Rwanda ?

La machette, un outil agricole commun dans les foyers rwandais, a été largement utilisée comme arme principale durant le génocide de 1994.

Près d'un million de Tutsis ont été tués en quelques semaines.

Cette étude (1) avait pour objet d'analyser les facteurs qui ont influencé l'utilisation d'armes modernes, comme les armes à feu, par opposition aux armes blanches traditionnelles, telles que des machettes.

Le contexte historique, économique et la réinterprétation des causes du génocide. Le génocide rwandais a souvent été perçu comme un conflit ethnique entre groupes tribaux, mais la recherche académique a depuis rejeté irrémédiablement cette vision simpliste.

En réalité, des facteurs économiques, tels que le revenu, la gouvernance et les institutions, jouent un rôle déterminant dans l’éclatement des conflits violents, y compris les guerres civiles et les génocides.

Importance des armes légères dans les conflits

Bien que les armes légères jouent un rôle crucial dans les conflits violents, peu d’études ont analysé leur utilisation spécifique lors de génocides.

Cette recherche (1) fournit une analyse quantitative de l’usage des armes à feu et sur les meurtres à l'arme blanche traditionnelles pendant le génocide, basée sur une vaste collecte de données au Rwanda.

La distribution des armes organisée pendant le génocide par le régime est documenté. En janvier 1994, des rapports révélaient que le gouvernement rwandais avait acheté et distribué des armes à la population civile dans le cadre d’un programme d’autodéfense.

En raison de la pénurie d’armes à feu, la population a été encouragée à utiliser des outils agricoles comme les machettes pour participer aux massacres.

La machette était une arme courante et accessible :

83 % des ménages ruraux rwandais possédaient une ou plusieurs machettes, selon une enquête de 1984. Cet outil agricole s’est rapidement transformé en une arme de choix, particulièrement dans les zones rurales où les armes à feu étaient moins disponibles.

Machettes et armes à feu : deux méthodes complémentaires

Les armes à feu étaient principalement utilisées lors des massacres à grande échelle dans des lieux comme les églises et les stades, où un grand nombre de Tutsis cherchaient refuge.

Les machettes, en revanche, étaient plus couramment utilisées dans les attaques individuelles, souvent dans des zones rurales.

Caractéristiques des victimes et type d’arme utilisé

Les jeunes hommes, en particulier ceux travaillant dans des secteurs modernes, étaient plus susceptibles d’être tués par arme à feu en raison de leur capacité à résister.

Les autres victimes, moins capables de se défendre, étaient souvent tuées à l’aide d’armes traditionnelles, comme la machette.

Organisation et incitations au massacre

La planification du génocide était centralisée. Contrairement à l’idée d’une violence spontanée, le génocide rwandais a été organisé de manière centralisée.

Des incitations matérielles et symboliques, telles que des promesses de terres ou de l'argent, ont été offertes aux participants, tandis que la propagande, largement diffusée à la radio, encourageait les massacres.

Le rôle des initiatives locales. Bien que les initiatives locales aient joué un rôle dans la violence, elles n’ont pu se produire qu'avec l'approbation implicite ou explicite des autorités centrales, confirmant ainsi l'existence d'une planification organisée.

Les communes présentaient des différences notables dans l’utilisation des armes. Par exemple, dans la commune de Mabanza, de nombreuses victimes ont été tuées par arme à feu, notamment lors du massacre au stade de Gatwaro.

En revanche, dans d'autres communes, l'usage des machettes prédominait en raison de leur disponibilité.

Les facteurs influençant le choix des armes

Les caractéristiques individuelles des victimes, telles que leur âge et leur profession, ont influencé la probabilité d'être tué par une arme à feu ou une machette.

Les jeunes hommes, souvent perçus comme des cibles plus dangereuses, étaient plus fréquemment tués par des armes à feu.

Conclusion

L’utilisation des armes durant le génocide rwandais ne s’est pas faite de manière aléatoire. Les machettes, largement disponibles, ont joué un rôle crucial, surtout dans les zones rurales et lors d’attaques individuelles.

En revanche, les armes à feu étaient utilisées de manière plus ciblée, notamment lors des massacres de grande envergure. Ces observations confirment le caractère organisé du génocide et soulignent l’importance de la logistique et des caractéristiques des victimes dans la dynamique des meurtres.

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Sources :

(1) https://journals.sagepub.com/doi/pdf/10.1177/0022343306059576
- https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89conom%C3%A9trie
- https://datatab.fr/tutorial/logistic-regression
- https://academic.oup.com/ije/article/38/4/1033/849053?searchresult=1
- https://www.aa.com.tr/fr/afrique/qui-est-f%C3%A9licien-kabuga-le-financier-du-g%C3%A9nocide-du-rwanda-portrait/1991102