12/12/2024
La littérature actuelle concernant le fardeau des blessures par arme blanche en Afrique subsaharienne est relativement limitée.
Le Malawi, un pays aux ressources restreintes situé en Afrique australe et présentant des similitudes avec ses voisins, constitue un indicateur pertinent de la fréquence de ces blessures dans la région.
Cependant, les caractéristiques, les issues et les facteurs de risque associés à la mortalité suite à ce type de blessures y sont encore peu documentés.
Ainsi, cette recherche (1) visait à analyser l'épidémiologie, les résultats, ainsi que les facteurs de risque préhospitaliers de mortalité chez les patients victimes de blessures par arme blanche dans un hôpital du centre du Malawi.
Chaque année, environ 5,8 millions de personnes décèdent des suites de blessures abdominales et thoraciques, responsables de 16 % des handicaps dans le monde.
Les pays à revenu faible et intermédiaire supportent une part disproportionnée de cette violence.
Si les traumatismes contondants, souvent liés aux accidents de la route, sont la principale cause de décès traumatiques, les blessures pénétrantes par arme blanche représentent également un problème majeur dans certains pays, notamment aux États-Unis, en Angleterre et en Afrique du Sud.
Ces blessures, causées par des armes tranchantes ou pointues, peuvent entraîner des dommages graves aux organes internes ou aux vaisseaux, provoquant des infections, des chocs ou des décès.
Le fardeau des traumatismes, qui pèse principalement sur les pays à revenu faible et intermédiaire, est bien établi. Pour améliorer les soins et les résultats, il est essentiel de comprendre les spécificités locales des blessures.
Les types de traumatismes pénétrants varient selon les sociétés, influencés par l'accessibilité des armes. Dans des pays comme les États-Unis et l'Afrique du Sud, où les armes à feu sont largement disponibles, la violence armée est en hausse.
En revanche, en Afrique subsaharienne, des outils comme les machettes ou les couteaux, économiques et accessibles, sont souvent utilisés dans les violences interpersonnelles.
Ces différences soulignent l'importance d'adapter les approches en fonction de l'épidémiologie locale des traumatismes.
Une analyse rétrospective basée sur le registre de surveillance des traumatismes de l'hôpital central de Kamuzu (KCH) (2) a été menée de février 2008 à août 2018.
Tous les patients admis aux urgences pour blessures traumatiques sont inclus dans cette base de données, enrichie par des commis spécialisés durant l'hospitalisation.
L'étude ciblait les patients présentant des blessures par arme blanche, à l'exclusion de ceux sans données sur les résultats.
Le KCH, hôpital de référence pour 7,5 millions de personnes, est situé à Lilongwe, au Malawi, et compte 900 lits. Il dispose de services d'urgences, de soins intensifs et de plusieurs spécialités
chirurgicales.
La gestion des traumatismes y est assurée par une équipe multidisciplinaire incluant médecins généralistes, orthopédistes et chirurgiens.
L’analyse univariée a révélé moins de 3 % de données manquantes pour les variables étudiées.
Une régression a identifié les facteurs de risque de mortalité, incluant l’âge, le sexe, le lieu et l’heure de la blessure, le délai avant l’arrivée, la consommation d’alcool, le mode de transport et le transfert depuis d’autres hôpitaux.
Les résultats ont été décrits selon des mesures de tendance centrale et une analyse de la mortalité à la sortie de l’hôpital.
Sur 32 297 patients victimes d’agression étudiés, 2 352 (7,3 %) présentaient des blessures par arme blanche. L’âge médian était de 26 ans, avec une prédominance masculine.
La majorité des incidents survenaient en journée, souvent à domicile, sur la route ou dans la rue. Les blessures fréquentes touchaient :
La mortalité globale était de 3,2 %. Aucune différence significative n’a été observée entre les survivants et les décédés concernant l’âge, le sexe ou la consommation d’alcool.
Cependant, la majorité des décès survenaient après des blessures nocturnes (70,3 %) et concernaient principalement des patients transportés par la police (53,5 %) ou par véhicule privé (29,6 %).
Les patients survivants étaient davantage transportés par minibus (46,4 %) ou transférés depuis un autre hôpital (17,3 % contre 8,2 % pour les décédés).
Les blessures thoraciques étaient la principale cause de décès (41,9 %), tandis que les blessures à la tête ou au cou prédominaient chez les survivants (45,0 %).
Les analyses ont révélé que les blessures au thorax augmentaient significativement le risque de mortalité par rapport à celles aux extrémités, tout comme le transport par police ou véhicule privé par rapport au minibus.
Les blessures par arme blanche représentent 7,3 % des agressions étudiées sur une période de dix ans au Kamuzu Central Hospital (KCH), avec une mortalité globale de 3,2 %.
Les blessures thoraciques étaient associées au risque de mortalité le plus élevé, tandis que le transport préhospitalier par véhicule privé ou par la police augmentait également la probabilité de
décès.
La gestion des blessures suit une évaluation systématique basée sur l’état des voies respiratoires, de la respiration et de la circulation, avec des compléments diagnostiques tels que
radiographie et tomodensitométrie.
Les lacunes dans les infrastructures, comme le manque de banques de sang robustes, les équipements limités et les pénuries de transport d’urgence, compliquent les soins et contribuent à la
mortalité élevée.
Les défis préhospitaliers incluent des délais d’accès aux soins, souvent dus à des contraintes financières, culturelles ou géographiques, et l’absence de services d’intervention d’urgence
centralisés.
La plupart des patients transportés par la police ou des véhicules privés faisaient face à un risque accru de décès en raison de retards et de l’absence de soins initiaux appropriés.
La gestion était principalement non chirurgicale. Cependant, les blessures abdominales et pelviennes nécessitaient fréquemment une intervention chirurgicale en raison des limites diagnostiques
locales.
Les pénuries de sang, aggravées par l'anémie prévalente et les maladies transmissibles, restaient un obstacle majeur pour les soins.
Les efforts pour réduire la mortalité devraient inclure des interventions à faible coût, telles que la formation en soins d’urgence pour les premiers intervenants, le renforcement des systèmes de
transport et des infrastructures hospitalières, ainsi qu’un soutien accru aux services de transfusion sanguine.
La prévention des blessures par arme blanche implique des mesures individuelles et sociétales. Sur le plan individuel, les victimes peuvent réduire leur risque en évitant les zones isolées, en restant vigilantes et en évitant l'ivresse.
Au niveau sociétal, les données au Malawi montrent une corrélation entre la violence interpersonnelle et le chômage, soulignant l'importance de stratégies gouvernementales pour réduire la pauvreté et la violence.
La prévention des blessures doit inclure des efforts pour améliorer la sécurité publique et les conditions socio-économiques.
Cette étude présente des limites liées à sa nature rétrospective et au contexte du Malawi. Le registre de traumatologie du KCH a évolué, ajoutant des données sur les signes vitaux après 2012, mais les informations pré-hospitalières et sur la gravité des blessures restent absentes.
L'absence de système pré-hospitalier empêche d'analyser les soins initiaux et leurs impacts sur les résultats. De plus, des données spécifiques comme le type d'arme utilisée ou la relation entre l'agresseur et la victime manquent, limitant la portée des conclusions.
Ces lacunes pourraient influencer l'interprétation des résultats.
Enquête sur les blessures aux couteaux Collins à la Barbade Entre mars et novembre 1998, une enquête prospective a été menée pour analyser les caractéristiques des blessures causées notamment par des couteaux...
Les armes dans les meurtres en Corée : tranchantes ou contondantes ? En Corée du Sud, environ 76,5 % des meurtres impliquent l’utilisation d’une arme. Les couteaux étant les plus...
Sources :
(1) Outcomes of stab wounds presenting to Kamuzu Central Hospital in Malawi
Brittany Robinson, Laura N Purcell, Chifundo Kajombo, Jared Gallaher, Anthony Charles. https://www.ajol.info/index.php/mmj/article/view/206427
(2) https://en.wikipedia.org/wiki/Kamuzu_Central_Hospital